Au cours des trois dernières années, j’ai eu le privilège de travailler avec trois brillants milléniaux dans le cadre du programme PDG pour un mois d’Adecco. Chaque année, le candidat retenu du volet canadien du programme m’accompagne pendant un mois. N’ayant pas souvent la chance de côtoyer des personnes qui font leurs premiers pas dans notre domaine, c’est une expérience rafraîchissante et l’occasion pour moi de me remettre en question et de réévaluer ma vision du monde, tout en contribuant à l’essor de jeunes professionnels.
Par ailleurs, le programme a suscité des discussions animées avec mes collègues boomers au sujet des milléniaux. Ces échanges m’ont permis de comprendre que la notion « milléniaux contre boomers » est une fausse dichotomie. En tant qu’êtres humains, nous aimons classer les choses dans des catégories qui nous permettent de mieux les comprendre. Regrouper les personnes d’un certain âge et les appeler « milléniaux » ou « boomers » est une façon commode de se représenter un groupe pourtant très hétéroclite. En effet, les expériences d’un jeune de Toronto seront nécessairement fort différentes de celles d’une personne à Madrid, à New Delhi ou à Saint Louis.
Je suis entré sur le marché du travail alors que le taux de chômage oscillait entre 10 et 14 pour cent et que les emplois étaient extrêmement rares. Si j’avais grandi avec le faible taux de chômage que nous connaissons aujourd’hui, j’aurais probablement fait peu de cas de la loyauté envers l’employeur et j’aurais changé d’emploi au fil des occasions, comme le font les milléniaux de nos jours.
À la faiblesse du taux de chômage s’ajoute une abondance de choix grâce à la technologie. Un marché favorable aux employés couplé à des technologies de recrutement en constante évolution nous donne à tous un accès facile à l’emploi et favorise le roulement de personnel.
Les entreprises peuvent créer des conditions qui stimulent la loyauté envers l’employeur et d’autres valeurs soi-disant incarnées par les boomers, mais je crois que c’est principalement la combinaison de l’économie et de la réalité technologique d’aujourd’hui qui est à la source des différences entre les expériences professionnelles de ces générations de travailleurs.
Dans un souci de représentation équitable, je cède maintenant la tribune à notre PDG pour un mois 2019, Frances Doria.
Voici ce qu’elle a à dire :
Je crois que les milléniaux appartiennent à l’une des générations les plus portées par leurs valeurs. Plusieurs d’entre nous avons grandi avec l’idée que notre voix est une force et que nous sommes capables de provoquer le changement. Dans la sphère professionnelle, cette perspective idéaliste nous a encouragés à chercher du travail là où notre individualité est accueillie et où notre voix peut faire une différence.
Nous avons également grandi à une époque où l’accès à l’information et notre connaissance du monde ont crû de manière exponentielle. Ce changement de culture est survenu durant nos années d’apprentissage et a insufflé en nous une curiosité envers l’immensité du monde et un désir constant d’apprendre.
Dans leur incarnation de ces valeurs axées sur l’individualité et l’apprentissage continu, certains milléniaux peuvent donner l’impression de croire que tout leur est dû. Refuser un emploi pour quelque chose d’aussi banal qu’un code vestimentaire ou aussi fondamental qu’une culture de travail toxique peut donner une impression de « tout m’est dû ». Et il y a peut-être là une part de vérité. Mais c’est justement ce sentiment que tout nous est dû qui est le moteur de notre idéalisme, qui nous fait remettre en question le statu quo et repousser les limites afin de créer un monde meilleur, dans lequel l’individualité de chaque personne peut prendre son essor.
Si les milléniaux sont réputés pour quitter des emplois payants sans raison, plusieurs d’entre nous avons grandi en tant que témoins des traumatismes, du stress et de la désillusion de nos parents et de nos grands-parents face à des milieux de travail structurés et sans pitié. Nous sommes conscients que les conditions du marché du travail d’aujourd’hui nous offrent plus de choix que n’en ont eu nos parents et que cela nous met dans une position privilégiée. C’est donc en hommage aux sacrifices de nos parents et de nos grands-parents que nous nous efforçons de bâtir des cultures de travail saines, dans un lieu que nous serons fiers de considérer comme un deuxième chez nous.
Mon expérience m’a appris que les milléniaux et les boomers sont des gens très différents. Cela dit, il est facile de gérer les milléniaux : traitez-les comme vous traitez vos amis – voyez-les comme des individus, présentez-leur un parcours de croissance et donnez-leur la possibilité d’apprendre constamment.
Même si Frances et moi avons une vision différente des particularités de l’interaction entre nos générations, notre conclusion est essentiellement la même : le succès passe par la compréhension mutuelle des différences de l’autre et la capacité de s’adapter à ses besoins.
Gérer les milléniaux au travail
Voici mes conseils pour bien travailler avec les milléniaux.
Créer un milieu de travail empreint de respect
Un effectif multigénérationnel est un effectif diversifié. Comme vous le feriez avec n’importe quel groupe diversifié, vous devez commencer par créer un milieu de travail qui favorise le respect mutuel entre collègues. En reconnaissant vos collègues pour leur contribution professionnelle, vous commencerez à éliminer les stéréotypes associés aux différentes générations et vous donnerez la chance de développer une collaboration fructueuse.
Miser sur les différentes forces de chacun
Créez de la valeur dans votre entreprise en tirant parti des différentes forces de votre personnel. Si les boomers excellent dans les relations avec la clientèle et la connaissance du métier, les milléniaux brillent par leur maîtrise de la technologie, des médias sociaux et du mode multitâche. Mettez à profit ces différentes forces en formant des équipes diversifiées composées de collègues issus de différentes générations.
Promouvoir l’inclusion par le travail en équipe
Nous sommes tous coupables d’entretenir des préjugés. En affaires comme dans les autres sphères de notre vie, nous percevons automatiquement nos ainés comme des sages. Bien entendu, il est plus facile d’écouter un membre de l’équipe plus âgé et plus expérimenté qu’un autre qui a beaucoup moins d’expérience. Lorsqu’une jeune personne vous remet en question, votre réaction immédiate peut être de vous mettre sur la défensive – résistez-la. Vous devez vous demander si vous écoutez cette personne avec la même attention qu’une autre; les chances sont que ce ne soit pas le cas. L’intelligence et l’innovation ne viennent pas avec l’âge. Un préjugé qui vous empêche d’écouter des points de vue diversifiés peut vous nuire.
La collaboration devrait être un incontournable dans tous les projets. Accueillez la diversité qu’apporte une équipe multigénérationnelle et encouragez tant les boomers que les milléniaux à travailler ensemble sur tous les projets. Cette collaboration suscitera un mélange d’idées et de points de vue différents et favorisera la créativité et l’innovation. En prime, en mettant l’accent sur la collaboration au travail, vous aiderez vos collègues à faire fi de leurs différences et à trouver des valeurs communes.
Faire de la communication ouverte une priorité
La transparence est essentielle, surtout lorsqu’il s’agit de répondre aux besoins des équipes multigénérationnelles.
Reconnaissez que les boomers et les milléniaux privilégient des styles de communication différents. Les boomers ont tendance à préférer des moyens de communication plus traditionnels, comme les rencontres en personne ou les appels téléphoniques. À l’opposé, les milléniaux ont grandi sous l’influence de la technologie et des médias sociaux. Ils veulent de l’information et des communications rapides et accessibles; c’est la raison pour laquelle ils préfèrent communiquer par courriel ou par messagerie texte. Combinez ces moyens de communication pour répondre aux besoins des deux générations, tout en établissant des voies de communication claires au sein de l’entreprise.
Créer un programme de mentorat
La création d’un programme de mentorat est le moyen idéal pour encourager les milléniaux et les boomers à travailler ensemble dans un environnement non menaçant. Non seulement les programmes de mentorat aident-ils à combler les lacunes dans les connaissances (des deux côtés, bien souvent), ils permettent tant aux milléniaux qu’aux boomers d’apprendre des forces et des styles professionnels des uns et des autres, et de créer un milieu de travail efficace, productif et harmonieux. Par ailleurs, alors que les boomers s’approchent de leur retraite, le mentorat est un bon moyen d’entamer le transfert des connaissances et assurer la continuité au sein de l’entreprise.
Personnellement, le programme PDG pour un mois a redynamisé mon approche à l’égard du travail. Lorsque vous êtes en affaires depuis longtemps, il est facile de vous cantonner dans une pensée linéaire. L’intégration d’une personne débutante dans l’entreprise est le meilleur moyen de se rappeler à quel point vos débuts ont été difficiles. Pour répondre aux questions de Frances au sujet de l’entreprise et pour lui expliquer les choses de manière cohérente, j’ai dû revenir à l’essentiel, me remettre en question et réexaminer l’entreprise du point de vue d’une personne de l’extérieur. Cela m’a permis non seulement d’initier Frances à notre secteur, mais aussi de revoir mon processus décisionnel.
Malgré de nombreuses inquiétudes et d’innombrables réflexions, il est possible pour les boomers et les milléniaux de bien travailler ensemble. Il suffit de faire preuve d’ouverture, de compréhension et de patience.
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